Notre-Dame du Corbu

A Ronchamp, en Haute-Saône, il est une drôle d’église qui domine le paysage. Du haut de sa colline, Notre-Dame-du-Haut détonne par son architecture toute en courbes et en arêtes. Une œuvre signée Le Corbusier qui lui vaut aujourd’hui un classement au patrimoine mondial de l’Unesco.

La journée faisait figure d’exception. Oui, ce jour-là, nous avons entendu parler anglais ou allemand et on n’était pas prêtes. Il faut dire que depuis le début de notre séjour en Haute-Saône, nous n’avions pas croisé des masses de touristes, et encore moins non francophones.

Mais que font donc tous ces visiteurs étrangers dans ce véritable no man’s land touristique qu’est la Haute-Saône, ce département où même nos compatriotes font une moue dubitative (à tort) quand tu leur dis que c’est là que tu passeras tes deux semaines de vacances estivales ?

Seul un précieux sésame pouvait déplacer les foules internationales : el famoso label « patrimoine mondial de l’UNESCO ». Ça tombe bien, la chapelle Notre-Dame-du-Haut en est pourvu.

Piquées de curiosité, nous voilà donc parties sur les routes désertes de ce coin de Franche-Comté, direction Ronchamp. Comme d’habitude, on a souri devant le panneau de l’Eden Parc, « la discothèque des + de 30 ans », ce qui en dit long sur l’âge moyen de la population locale.

Ça y est, notre carrosse est posé sur le parking qui jouxte Notre-Dame-du-Bas, l’église « cœur de village » de Ronchamp. Enthousiasme général. « Ça capte ! » Telles deux ados en manque, on se rue sur nos portables pour donner quelques nouvelles à nos familles respectives (les occasions sont minces de trouver plus de 2 barres et notre location se trouve en pleine zone blanche). Et puis on se met en branle en direction de la chapelle classée.

Notre sentier s’avère être le chemin de croix. On y trouve des trucs assez bizarres, comme des chaussures de rando déposées là, au pied de l’étape V. Et puis ça monte. Pas mal. On y va tranquille, de toute façon, on n’est pas pressées. Les deux seules nanas à débarquer un peu en sueur et en tenue de marche à l’entrée du site pendant que les autres visiteurs arrivent pépouze en se garant sur le grand parking, c’est nous !

Surprise, le site est payant. 9 euros par personne en haute saison, sans compter que nous avions oublié notre Carte d’hôte gentiment fournie par l’Office de tourisme de Luxeuil-les-Bains, qui donne droit à des tarifs réduits sur une sélection de sites touristiques.

Elle est là, au milieu des arbres. Couleur ciment, bien sûr. On ne s’attendait pas à autre chose de la part du Corbusier ! Histoire de garder le suspense jusqu’au bout, on attaque d’abord par l’Abri du pèlerin. Du béton brut de décoffrage, des couleurs vives, un carrelage vintage à souhait et un confort assez spartiate.

La chapelle occupe une position dominante. C’est d’ailleurs LA raison pour laquelle Le Corbusier a répondu favorablement au projet de reconstruction, lui, l’architecte qui se déclarait athée. « Je n’avais rien fait de religieux, mais quand je me suis trouvé devant ces quatre horizons, je n’ai pu hésiter ». La chapelle, déjà reconstruite dans l’entre-deux-guerres à la suite d’un incendie, avait fait les frais d’un bombardement qui l’avait laissée en ruines à l’issue de la Seconde guerre mondiale. En faisant appel à un architecte star, les décideurs ont redonné un grand coup de projecteur sur ce lieu de pèlerinage multiséculaire.

Notre-Dame-du-Haut, c’est d’abord un mélange de courbes et d’arêtes saillantes. De rares ouvertures et un toit emblématique inspiré d’une carapace de crabe que l’architecte helvète avait trouvé sur une plage américaine. Un autel extérieur et des escaliers dont on ne comprend pas trop l’utilité. Nous arrivons en pleine célébration d’une messe. Le lieu abrite un monastère et l’activité religieuse y est encore bien présente. Par chance, la célébration se terminait.

Ce qui marque de prime abord, c’est le vide et l’ambiance grisouille. Contrairement à l’abri du pèlerin, qui s’orne de quelques panneaux de couleurs vives, la chapelle arbore uniformément un crépi épais de couleur crème, sans oublier le gris béton du toit. Seuls la porte sud et deux-trois morceaux de vitrail offrent à l’œil une touche de gaieté. L’originalité réside plutôt dans les chapelles latérales, aux formes arrondies et surmontées de tours faisant office de puits de lumière, qui attirent le regard vers le haut.

Pour tout te dire, je n’ai pas vraiment accroché à Notre-Dame-du-Haut. Du Corbusier, je préfère largement la villa Savoye à Poissy et la Cité radieuse, à Marseille. Peu importe, le site naturel offre une belle vue et il est agréable d’en faire le tour pour voir l’ensemble des installations du monastère. La Pyramide de la Paix, simili temple maya construit avec les pierres de l’ancienne chapelle, le campanile signé Jean Prouvé, la porterie, la chapelle et le couvent Sainte-Claire, œuvres de Renzo Piano. Le site rend hommage à plusieurs cadors de l’architecture contemporaine, mais c’est au titre de « L’Œuvre architecturale de Le Corbusier, une contribution exceptionnelle au Mouvement Moderne », que la chapelle figure aujourd’hui dans la prestigieuse liste du patrimoine mondial de l’Unesco.

Nous redescendons le long de la D264 histoire de passer devant l’ancien Puits Sainte-Marie, témoin du passé minier de Ronchamp. Et, comme toute aventure d’Astérix, notre escapade à Ronchamp s’achève par un banquet un resto, où j’aurais mieux fait de m’abstenir de commander de la carpe (je voulais tester la gastronomie locale mais le goût de vase n’est pas vraiment ma tasse de thé).

Oh attends ! Avant de partir, je préfère te prévenir d’un truc. Patiente un peu avant de visiter Notre-Dame-du-Haut ! Depuis ma visite à l’été 2021, l’eau a coulé sous les ponts et les échafaudages ont pris place autour de l’édifice. Il faudra attendre 2025 pour que le carcan de fer soit démantelé et dévoile à nouveau la chapelle. Pour une fois que c’est pas moi qui doit encaisser la déception de trouver un lieu fermé au public ou caché derrière des échafaudages !

Cet article s’inscrit dans le RDV mensuel #EnFranceAussi initié par Sylvie, du blog Le coin des voyageurs. Le principe est simple : te faire (re)découvrir la France à travers un thème donné. Ce mois-ci, c’est le thème « classé » qui est à l’honneur, piloté par Eimelle, du blog Tours et culture. Tu trouveras les autres billets rédigés par mes camarades blogueurs et blogueuses sur cette carte :

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8 commentaires sur “Notre-Dame du Corbu

    1. Une drôle d’église oui. Difficile de bien rendre en photo d’ailleurs (l’obscurité n’a pas rendu la tâche facile). Et surprenant aussi de croiser cette œuvre majeure du Corbusier dans la pampa Haut-Saônoise ! Merci de ta visite.

    1. C’est d’autant plus inattendu que j’ai lu que Le Corbusier n’était pas vraiment chaud pour construire une église. Mais il s’est laissé séduire par les lieux et maintenant, Ronchamp a toute sa place dans le monde de l’architecture.

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